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Aux Mères heureuses
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Manuscrit autographe signé d'un article publié à la une du Figaro le 18 avril 1891. L'article présente les activités de la Société Maternelle Parisienne, une association qui vit le jour la même année et qui mit sur pied le projet de la première "pouponnière".
Author: | Zola, Emile |
Title: | Aux Mères heureuses |
Language: | French |
No of scans: | 40 |
Type: | Manuscript |
Document
- AuthorsZola, Emile
- Author Years1840-1902
- TitleAux Mères heureuses
- Language(s)fre
Publication, distribution
- Context-IntertextLe cercle de Marguerite Charpentier et le projet d'une "pouponnière"
Les trois femmes mentionnées par Zola dans cet article ont fondé en 1891 la Société maternelle parisienne (SMP) dont le premier projet "La pouponnière" à Rueil, fut un projet pionnier en matière de protection de la mère et de l'enfant, il s'agit de :
- Marguerite Charpentier, épouse de Georges Charpentier, éditeur de Zola et présidente de la SMP;
- [Jenny ?] Manuel, épouse du poète Eugène Manuel (membre du Conseil supérieur de l’Instruction publique et Inspecteur général de l’Université depuis 1878);
- Madame A. Sain (dont on ne sait malheureusement rien).
Marguerite Charpentier (1848-1904), née Marguerite Louise Lemonnier, et son époux, ont été d'importants mécènes pour de nombreux artistes. Marguerite organisait des salons où se retrouvait le Paris mondain, des hommes de lettres (dont Zola), et des artistes (dont plusieurs représentants de l'impressionnisme) entre autres. Importants collectionneurs de peintures impressionnistes, les Charpentiers ont commandé de nombreuses peintures à Auguste Renoir, qui aimait s'appeler "Le peintre privé des Charpentiers". Marguerite Charpentier est l'auteure d'un article sur les pouponnières (M. Charpentier, 1898).
Le peintre Auguste Renoir aurait eu une influence déterminante, jusqu'à représenter peut-être l'étincelle initiale du projet de Marguerite Charpentier (cf. V. Meyer, pp.82-83). D'après Jeanne Baudot, élève du peintre : "Au temps de sa jeunesse, lorsqu’il fréquentait le Moulin de la Galette, Renoir fut ému et hanté par les conditions de vie lamentables des enfants nés par suite de rencontres sous les ailes du Moulin et qui devaient pousser comme l’herbe des champs dans le maquis montmartrois. Beaucoup mourraient en bas âge. Renoir eut l’idée, pour les sauver, de fonder un « Pouponnat ». Il mit Mme Charpentier au courant de son projet, elle s’y intéressa et finit par le réaliser. Avant qu’elle ne s’y consacrât, Renoir et ses amis avaient organisé une fête au Moulin de la Galette, afin de recueillir la somme nécessaire à la mise en marche de cette œuvre, mais la recette ne répondit pas à leurs espérances. Ce ne fut que plus tard, grâce au zèle déployé par Mme Charpentier, que l’œuvre fut créée sous le nom de « Pouponnière ». Combien d’êtres ignorent qu’ils devaient la vie à un grand artiste au cœur compatissant" (J. Baudot, p.21). Renoir alla jusqu'à organiser avec d'autres artistes une collecte de fonds au Moulin de la Galette, collecte qui n'apporta que trop peu d'argent au projet de Marguerite Charpentier.
Le développement du projet "La Pouponnière"
Le nom de la maison "La Pouponnière" est entré dans l'usage pour désigner tout lieu d'accueil et de soin de la petite enfance: "Le mot pouponnière (…) a été employé pour la première fois en 1891 par Mme G. Charpentier et Mme Eugène Manuel lorsqu'elles créèrent la Société maternelle parisienne." (R. Heucqueville, p.68) "L’établissement est d’abord implanté à Rueil en 1891, puis, en raison de l’insuffisance des locaux, s’installe dans un pavillon construit par l’architecte Jacques Hermant (le père d’Abel Hermant, beau-fils des Charpentiers) à Porchefontaine, un quartier de Versailles, en juin 1893. La capacité de l’établissement ne cesse ensuite d’augmenter. Il compte trois pavillons en 1897, et sept en 1906. Les enfants sont 30 en 1893, 46 en 1896, puis 192 en 1904." (V. Meyer, p.76).
La société maternelle parisienne développa plusieurs "pouponnières" en région parisienne, jusqu'à contribuer, avec les nouvelles règles d'hygiène dans les institutions d'aide sociale, à freiner la mortalité infantile. Le contexte de sa fondation et de son développement fut celui d'une période de crise démographique dans l'histoire française: "La Pouponnière" avait alors été fondée pour "lutter contre le dépeuplement". Plus tard, en 1922, elle comprenait un asile d'allaitement, une pouponnière (nurserie d'enfants de 0 à 2 ans et prise en charge des nourrices), "une vacherie modèle", une école ménagère (cours donnés aux mères résidentes), un pavillon-infirmerie, une salle de consultation de nourrissons, les "nids de Porchefontaine" (nurserie d'enfants de 0 à 5 ans) et une école d'enseignement supérieur et élémentaire dénommée "La Nouvelle Etoile" (Heucqueville, p.76). "La Nouvelle Etoile" est une institution active aujourd'hui encore.
Le legs de Zola
Après le décès de Zola, en 1905, son épouse Alexandrine Zola, légua le domaine de Médan (maison de campagne de Zola) à l’Assistance publique. Elle servit de pouponnière pour enfants convalescents de 1907 à 1967, d’école d’infirmières à partir de 1967, puis d’école d’ambulanciers entre 1979 et 1990. Depuis 1990 la Maison Zola abrite un musée.
L'engagement de l'écrivain en faveur de l'assistance aux familles défavorisées, et notamment des mères en difficulté, est en arrière-plan de son oeuvre. Elle fait néanmoins l'objet particulier d'un ouvrage, au premier cylce des Quatres Evangiles, intitulé "Fécondité" (1899). Zola y dénonce les problèmes de l'abandon des enfants, leur traitement par l'assistance publique, l'avortement et l'infanticide.
Edition
Description material
- TypeManuscript
- Collation19 montages de feuillets découpés pour l'impression et remontés. Ces "feuillets montés" sont de diverses dimensions. Le papier est roussi et non vergé. Les morceaux coupés sont de longueurs différentes. Les feuillets étaient, avant le montage, pliés horizontalement. Les montages se composent de 2 à 3 morceaux de feuillet maximum. Certains feuillets n'ont pas été coupés et ne contiennent aucun collage (fols. 1, 11 et 17). Le dernier feuillet, fol. 19, contenant la signature "Emile Zola" a été coupé (110 mm de hauteur), c'est le plus petit feuillet du manuscrit. Traces d'un ancien trombone qui retenait le dernier feuillet au fol. précédent.
Tous les feuillets sont numérotés à l'angle supérieur droit au crayon à papier. Une numérotation autographe des feuillets est visible aux fols. 5r. ("3" entouré) et 10r ("5" encadré). Le chiffre "8" est entouré au milieu du texte à droite du fol. 17.
Texte autographe écrit à l'encre noire, au recto de chaque feuillet. Nombreuses ratures, surcharges et corrections autographes. Le mot "heureuses" du titre corrige le terme "parisiennes" raturé (surligné deux fois). En plus des nombreux alinéas, le texte contient quatre astérismes autographes signalant des sections (fols. 2, 5, 9 et 13). Les majuscules sont doublement soulignées.
De nombreuses inscriptions au crayon bleu de typographe ont été effacées (au fol. 1r., un crochet à la droite du titre, un trait ramenant "mères heureuses" à la suite de l'article "Aux"; et ce qui semblait être une indication de police sur la marge supérieure, aujourd'hui illisible). De plus, la même main a inscrit au crayon bleu, à chaque feuillet et au milieu de la page, sur le texte, la pagination de 1 à 20 suivie de la lettre "Z" (le fol. 6r., montage de deux morceaux de feuillets, contient les inscriptions "6 Z" et "7 Z"). Au fol. 18r., la même main, au crayon bleu, indique un retour à la ligne (crochet) et surcharge la première lettre du texte, éléments non effacés.
Le nombre 185, écrit au recto du premier montage (angle inférieur gauche) au crayon à papier, de la main de Heinrich Hinterberger, correspond au numéro de ce manuscrit dans la liste tapuscrite adressée par Stefan Zweig à Martin Bodmer à l'occasion de la vente de sa collection.
Remarques
- General NotesL'article de Zola est un appel à intervenir en faveur de l'enfance et de la maternité.
Madame Charpentier, présidente et co-fondatrice de la toute nouvelle "Société maternelle parisienne" et amie de l'auteur, invite Zola à venir visiter sa maison de Rueil mise à disposition et aménagée pour servir de lieu d'accueil et de vie à plusieurs enfants et nourrices. Le lieu est idéal, en pleine campagne bien qu'aux portes de Paris, aménagé pour prendre soin, dans les règles de l'art, d'enfants de 0 à 6 ans. Le projet est pionnier et d'une importance humaine capitale, Zola le sait.
Durant sa visite, il rencontre des mères fatiguées après une longue journée de travail qui viennent promener leur bambin, quelques heures volées à un quotidien harassant. Qu'elles soient vendeuses ou institutrices, Zola dresse les portraits de femmes prises au piège d'un système qui souvent les porte à de tristes dilemmes. La femme active, mère et travailleuse, est un "rouage dans la grande machine sociale". La plupart de ces mères n'ont pas les moyens d'avoir chez elles une nourrice. Le choix d'une "séparation violente, contraire à la nature, exécrable au point de vue social et humain", n'en est plus un. Poussées à s'éloigner "dix mois sur douze" de leur enfant, les mères tentent de vivre "sans connaître, sans élever, sans aimer" l'enfant qu'elles ont porté.
Après avoir dénoncé le taux élevé de mortalité infantile lié aux conditions effroyables dans lesquelles les gardeuses s'occupent des nourrissons, enfants qu'elles accueillent chez elles en ville, l'auteur dresse une triste conclusion : "toute femme qui travaille, à Paris, ne peut pas être mère, et elle qui devrait être récompensée de son courage à lutter et à vivre, elle se trouve sous cette fatalité monstrueuse d'être comme punie de bien faire".
C'est alors que la maison pour enfants et nourrices de la Société Maternelle Parisienne intervient. Il s'agit d'une "œuvre de tendresse et de justice" qui "a poussé ainsi dans le cœur de trois mères heureuses, émues presque jusqu'au remords du déchirement des mères travailleuses et déshéritées. (...) Cette œuvre n'est pas la charité, elle est l'aide au travail, (...) la bonne morale en action", elle évite aux mères d'envoyer leurs enfants trop loin d'elles ou de les donner à garder en ville dans de dangereuses conditions. Elle protège les enfants de l'abandon ("tout enfant qui n'aurait pas reçu la visite de sa mère pendant un trimestre serait rendu") et de la maladie (visite quotidienne d'un médecin).
L'article vise à promouvoir le projet de la Société Maternelle afin de lever les fonds nécessaires au développement de la première "pouponnière" de France : "une vingtaine de mille francs" sont demandés par l'architecte. Le même montant est nécessaire à un autre projet, celui de "Madame Henri", une sage-femme qui "est parvenue (…) à sauver près de quarante pour cent des enfants nés avant terme, en les élevant dans des couveuses".
Après avoir rappelé la triste statistique selon laquelle "il meurt plus de cent mille [enfants] en France par an", Zola exhorte enfin les femmes "privilégiées" à réagir: "Ô mères heureuses, il faut protester, il est mauvais que le travail soit puni, que la femme soit par là même frappée dans sa maternité. Et c'est vous, mères heureuses, mères privilégiées, qui devez jeter le cri en faveur des autres mères, les malheureuses, que la nécessité de la vie accablent. (…) Vous à qui la fortune permet de garder vos enfants, faites que toutes les femmes, même les laborieuses, puissent au moins voir grandir les leurs". - AbstractManuscrit autographe signé d'un article publié à la une du Figaro le 18 avril 1891. L'article présente les activités de la Société Maternelle Parisienne, une association qui vit le jour la même année et qui mit sur pied le projet de la première "pouponnière".
- BibliographyL'article est paru à la une du journal Le Figaro en date du 18 avril 1891 sous le titre "Aux Mères heureuses": GALLICA
Références:
- ZOLA, Émile, Les Quatre Évangiles. Fécondité, Bibliothèque-Charpentier, Fasquelle, Paris, 1899 : GALLICA
- CHARPENTIER, Marguerite, "De l'utilité des Pouponnières" in La Revue Philanthropique, 11 novembre 1898, Paris : GALLICA
- MEYER, Virginie, Georges Charpentier (1846-1905) : figure d'éditeur, Mémoire pour l'Enssib, Villeurbanne, 2005, pp.75-88 : ENSSIB
- BAUDOT, Jeanne, Renoir, ses amis, ses modèles, Éditions Littéraires de France, Paris, 1949.
- HEUCQUEVILLE, Raoul, L'élevage en commun des nourrissons, les
pouponnières, Maloine & fils, Paris, 1922.
Identification
- ConstellationManuscrits Autographes
- PID2086
- Shelf Markms. Bodmer Z-6.2